Découvrir les îles Blasket à l’ouest de la presqu’île de Dingle

Quand on part en croisière c’est toujours la météo qui décide… et ceci est encore plus vrai en Irlande ! Parmi les nombreuses destinations de croisières en Irlande visitées par Lord Jim, les principaux sites visités se situent dans les deux comtés de Cork et du Kerry, dans le sud-ouest de l’Irlande (Province du Munster). Et quand le temps nous le permet, nous ne manquons pas une escale aux îles Blasket

Carte de la côte SW de l'Irlande

La côte à cet endroit compte plusieurs baies profondes, comme la baie de Dingle. Ces baies sont toutes orientées face au sud-ouest, c’est-à-dire face à la houle et exposées aux vents dominants. Cette zone de navigation plutôt « exposée » compte deux archipels qui valent vraiment le détour quand la météo le permet : les iles Skellig et l’archipel des Blasket.
A l’extrême ouest de la péninsule de Dingle, les six îles Blasket (en français îles Blasques) forment un archipel dont l’histoire et la renommée sont vraiment étonnantes. Les six îles de l’archipel sont :

Great Blasket Island

Great Blasket Island (An Blascaod Mór) la « plus grande » qui ne mesure que 3 miles de long par ½ mile de large, Beiginis, Inishnabro, Inishvickillane, Inishtooskert et An Tiaracht coiffée de son phare.

Carte de l'archipel des Blaskets
Le village de Great Blasket Island

On décrit généralement l’archipel de Blasket comme un « archipel sauvage » dont les îles sont « inhospitalières et très abruptes ». Cela n’a pas empêché ces îles d’être habitées et de devenir célèbres grâce à quatre auteurs et à leur livre. La population de Great Blasket Island ne comptait que quelques centaines de personnes, et malgré cela ces trois écrivains Elisabeth O’Sullivan, Maurice O’Sullivan, Tomás O’Crohan et une conteuse Peig Sayers ont laissé un témoignage de la vie sur ces îles au début du 20e siècle.

A bord de Lord Jim on aime bien lire. La bibliothèque du bord est d’ailleurs bien fournie et à disposition de l’équipage. Mais la lecture c’est également un bon moyen de savoir où l’on va atterrir en croisière. Alors avant de vous embarquer pour l’Irlande voici de quoi vous donner envie de rêver à votre prochaine croisière à bord de Lord Jim.

L’histoire des habitants de l’archipel des Blasket

Les îles Blasket furent habitées jusqu’au milieu du vingtième siècle, par une population dont la vie précaire s’organisait autour de la pêche et de l’élevage de moutons. L’archipel des Blasket est une des régions d’Irlande où l’irlandais, une langue gaélique, est restée très vivante. De nombreux habitants des Blasket ne parlaient pas l’anglais mais seulement le gaélique. Le nom gaélique de l’archipel des Blasket est “Na Blascaoidí“.

ruines sur Great Blasket Island

Great Blasket Island fut la dernière de l’archipel à être habitée. Le 17 novembre 1953, les 22 derniers habitants sont évacués par le gouvernement irlandais. Avant cette date la population a régulièrement baissé, de nombreux jeunes étant attirés par le « rêve américain » des émigrés irlandais. Aujourd’hui l’archipel n’est habité que par les moutons, les marsouins communs, les phoques gris et les oiseaux marins. Le village de Great Blasket est désormais un village de pêche fantôme.

The Blasket Centre

Mais il n’y a pas si longtemps, les pêcheurs insulaires qui vivaient là, passaient leurs journées en mer sur des curraghs menés à l’aviron ou à la voile. Le Blasket Centre sur le continent à Dún Chaoin, est un centre d’interprétation entièrement consacré à l’histoire de l’archipel.

Les îles Blasket, une véritable école littéraire !

Tomas O' Crohan
Peig Sayers
Maurice O'Sullivan 20 ans de jeunesse

La population de Great Blasket Island entre 1841 et 1926 varie aux alentours de 145 habitants en moyenne. En 1936, on compte 110 habitants, car l’émigration vers les Etats Unis attire de plus en plus de jeunes (Sources : Discover the Islands of Ireland (Alex Ritsema, Collins Press, 1999). C’est d’autant plus incroyable qu’avec une population aussi réduite, cette île ait compté quatre auteurs qui ont fait connaitre la vie sur leur rocher dans toute l’Europe et aux États Unis.
Commençons par le plus ancien et peut être le plus connu des quatre. Tomas O’Crohan (1855-1937) a comme tous les hommes de l’île été pêcheur et éleveur de moutons. Son livre « L’Homme des îles » est paru en 1929. Publié à l’origine en gaélique il est ensuite traduit en anglais en 1937, et directement traduit du gaélique au français en 1949 par Jean Buhler et Una Murphy. L’écrivain allemand, prix Nobel de littérature, Heinrich Böll fut un de ces traducteurs enthousiastes. « L’Homme des îles » est considéré comme un classique et un chef-d’œuvre de la littérature gaélique. Le livre de Tomas O’Crohan sous la forme d’une correspondance avec un ami, est un témoignage tendre, naïf et plein d’humour de la rude vie sur l’île au quotidien. «L’homme des îles» chante la liberté, la dignité du travail, l’humilité de la condition humaine et sa grandeur. « Je n’ai pas dit toutes les souffrances qui s’abattaient parfois sur nous« , avoue Tomas O’ Crohan à la fin de son livre, mais il a réussi à rendre son récit inoubliable.
Les femmes ne sont pas en reste aux Blasket pour raconter la vie sur les îles. Peig Sayers (1873-1958) est considérée comme une exceptionnelle conteuse. Ne sachant pas écrire Peig Sayers dicte à son fils Micheal O Gaoithin, ses souvenirs qui seront publiés sous le titre « Autobiographie d’une grande conteuse irlandaise de Peig Sayers ». Née sur le continent Peig arrive sur l’île à 19 ans à l’occasion d’un mariage avec un ilien. Elle a largement contribué à la défense de la langue irlandaise, et ses contes nous font partager la poésie, le sens de l’humour, et de la dérision de ses gens pauvres et courageux.
Maurice O’Sullivan auteur de « Vingt ans de jeunesse » est né sur l’île en 1904. Il passe ses premières années sur le continent avant de revenir vivre sur l’île à l’âge de 7ans. En 1927 il quitte l’île non pas pour rejoindre New York comme de nombreux irlandais, mais pour rejoindre la « Garda Síochána » (les Gardiens de la Paix) la police de la République d’Irlande. Son livre fut publié en irlandais et en anglais en 1933. Raymond Queneau se chargea de la traduction française. Le livre « Vingt ans de jeunesse » est bâti sur une correspondance avec George Derwent Thomson qui était venu sur les Blasket pour apprendre l’irlandais.

lettres-de-la-grande-blasket-elisabeth-o-sullivan

La plus jeune des quatre auteurs est Elisabeth O’Sullivan née en 1911 sur Great Blasket. Là encore c’est une rencontre avec un anglais Georges Chambers, venu découvrir la langue irlandaise et la vie quotidienne sur l’île, qui va aboutir à la publication du livre. Les « Lettres de la Grande Blasket » sont en fait 30 années de correspondance entre Elisabeth et Georges. Elisabeth est la nièce de Tomas O’Crohan, et l’exemple de ce dernier qui va l’encourager à témoigner sur la vie d’ilien aux Blasket. C’est l’écrivain breton Hervé JAOUEN qui s’est chargé de la traduction en français. Cet auteur passionné par l’Irlande dit avoir mis du temps a achevé le travail, car il était difficile de se rendre sur place pour comprendre la vie sur l’île. Hervé JAOUEN était habitué à venir pêcher la truite et « la péninsule de Dingle ne se trouve pas sur cette route-là. On ne passe pas par hasard à Dingle, il faut y aller et en revenir. Certes, ce détour peur se faire au grand galop, mais pour moi se hâter en Irlande, est une hérésie… ».

l'archipel des îles Blasket

La navigation dans l’archipel des Blasket

dunquin harbor

L’ile de Great Blasket a beau se situer à 2 miles nautique du continent, ce n’est pas pour ça qu’on y accède facilement. Comme le dit Elisabeth O’Sullivan dans son livre, « si le temps est beau et ensoleillé ici même sur l’île nous n’appelons pas ça du beau temps, tant que la mer n’est pas calmée. Le temps est beau quand on peut quitter l’île et y revenir ». La houle est particulièrement sensible et forte. Les îles et la côte ont un relief fort qui accentue les effets de côtes (le sommet de Great Blasket culmine à 346m), et le courant est renforcé dans les nombreuses passes entre les îles et dans le Blasket Sound entre la pointe de Dunmore Head et Great Blasket. L’un des ports d’embarquement sur le continent se situe à Dunquin. Une simple cale d’embarquement qui n’offre aucun abri.

Sur Great Blasket le « port » est aussi très sommaire ! Une simple cale coincée dans une faille de roche, où les arrivées par mauvais temps doivent laisser quelques souvenirs. Bref naviguer dans les Blasket suppose qu’on garde un œil sur la météo, car les abris sont vraiment limités. Le seul recours est de s’abriter à Dingle en cas de mauvais temps. Malgré ça, les pêcheurs des Blasket naviguaient sur des curraghs, à la voile ou à l’aviron pour pêcher le homard et le maquereau. Les bateaux étaient remontés au sec après chaque navigation.

Phare sur An Tiaracht

Une des iles de l’archipel porte un phare beaucoup moins connu que le phare du Fastnet. Le phare d’Inishtearaght a été construit en 1870 sur l’île d’An Tiaracht. C’est la plus occidentale des îles Blasket et le point le plus occidental de toute l’Irlande. L’île est séparée en deux parties d’altitude différente, la partie orientale culmine à 200 mètres et la partie occidentale à 116 mètres. Elle abrite une très importe colonie d’oiseaux marins : puffin, pétrel tempête, fou de Bassan, sterne arctique, macareux moine…

En prévision d’une prochaine croisière vers l’Irlande sur Lord Jim, vous avez maintenant suffisamment de lecture pour vous mettre dans l’ambiance, en vous rappelant du conseil d’Hervé JAOUEN « se hâter en Irlande est une hérésie ».

Retrouvez toutes les informations et nos prochaines dates de croisières sur la page: Croisières à la voile en Irlande

Blasket Island